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L’open data au Cameroun

1 avril 2025

La gouvernance de la donnée est en plein chantier au Cameroun, ce travail de construction multidirectionnel est l’œuvre des administrations publiques, des organisations non gouvernementales, des associations et des acteurs privés qui portent l’ambition de créer un cadre juridique protecteur et un marché de la donnée régulé et attractif pour les investissements nécessaires au développement de l’économie numérique.

Initiatives gouvernementales

Le gouvernement camerounais a démontré son engagement en faveur de l'open data en créant le portail des données du Cameroun (https://cameroon.opendataforafrica.org), qui fournit une plateforme centralisée pour accéder et télécharger des ensembles de données gouvernementales. Le portail héberge actuellement une gamme de jeux de données couvrant divers domaines, notamment la santé, l'éducation, l'agriculture et l'économie.

En outre, le gouvernement a mis en place le programme Open Data for Governance in Cameroon qui vise à promouvoir l'utilisation des données ouvertes pour améliorer la gouvernance et améliorer les services publics. Le programme a formé des journalistes, des organisations de la société civile et des responsables gouvernementaux aux principes et méthodologies des données ouvertes.

La politique de l'open data

L’open data en tant que mouvement politico-juridique tel que conçu et abondamment concrétisé en France et dans l’Union européenne en général ne fait pas, pour le moment du moins, partie intégrante des politiques publiques au Cameroun. Comme analysé précédemment, les premières initiatives de publications de données, qui s’apparentaient plus à des obligations de transparence financière imposées par le FMI. La particularité de l’open data au Cameroun repose sur sa forte orientation vers la donnée statistique dans sa gouvernance. La gestion de cette donnée statistique concorde avec les principes fondamentaux de la statistique officielle des Nations Unies (1994) . Cette tendance est très présente dans les pays d’Afrique subsaharienne comme le relève El Hadji Malick Gueye en raison du rôle que jouent les INS (Instituts Nationaux de Statistique) dans la diffusion des données statistiques pour les besoins des gouvernements, des sociétés privées, des organisations internationales, de la société civile et du grand public. Notre analyse s’inscrit ainsi dans un champ prospectif censé tracer les grandes lignes de la construction de l’open data au Cameroun à la lumière des expériences françaises et Européennes. Expériences dont les leçons tirées d’erreurs commises ne permettraient que de produire une politique globale de transparence de la donnée centrée sur les droits et libertés des personnes et les valeurs de l’Ubuntu ciment des sociétés africaines.

Les stratégies réglementaires multisectorielles

Force est de constater que des stratégies orientées vers la publication de données publiques ou d’intérêt général sont mises en œuvre tant niveau national, sous-régional et régional. Membre fondateur de la CEMAC (Communauté Économique et Monétaire de l’Afrique Centrale) c’est principalement au sein de cette instance sous-régionale que la réglementation de l’économie numérique est impulsée à travers précisément les textes relatifs aux communications électroniques. En plus, il faut citer les lois types de la CEEAC (Communauté économique des États de l’Afrique centrale), adoptées en novembre 2016, relatives à la protection des données personnelles, au commerce électronique et à la lutte contre la cybercriminalité. Bien que n’étant pas dédiés spécifiquement aux données, ces textes, tout comme en Europe, consacrent les principes devant régir le marché du numérique dans la sous-région : ces principes sont notamment l’ouverture et la liberté du marché des activités de l’économie numérique ainsi que leur sécurisation.

L’outil U-Report, développé par l’Unicef en Ouganda en 2012, est piloté par le ministère de la Jeunesse et de l’Éducation civique et par l’Assemblée nationale au Cameroun depuis avril 2015. Il vise à encourager, par SMS, la participation citoyenne sur les thématiques de l’éducation, de la santé, de l’accès à l’eau, ou encore de l’assainissement. Des bénévoles, généralement très jeunes (entre 18 et 30 ans principalement), appelés U-Reporters, peuvent ainsi livrer leurs observations ou leurs propositions sur des sujets liés au développement de leur pays. En ce qui concerne les données environnementales, l’Open data for Environment in Cameroon (Odeca) constitue le projet de l’Association pour le développement intégré et la solidarité interactive, Adisi-Cameroun, financés par le Centre international de journalisme de l’université de Londres en Angleterre visant principalement à sensibiliser le public camerounais sur la disparition des mangroves, une conséquence des puits de carbone .

Implication des organisations non gouvernementales

Les organisations non gouvernementales (ONG) et les groupes de la société civile ont également joué un rôle crucial dans la promotion de l'open data au Cameroun. ADIS (Association pour le Développement de l'Informatique et des Systèmes) a été particulièrement active dans la promotion des initiatives d'open data, la réalisation de formations et l'engagement des décideurs politiques.

L'Initiative Open Data du Cameroun (CODIdi) est une autre organisation notable qui plaide pour l'open data. L'initiative s'engage auprès de diverses parties prenantes pour sensibiliser à l'open data, faciliter la collaboration et soutenir le développement de projets d'open data.

Les initiatives d'open data

L’Observatoire économique et statistique d’Afrique subsaharienne (AFRISTAT), avec ses 22 États membres, dont le Cameroun, est une organisation intergouvernementale, créée par un traité signé le 21 septembre 1993 par les 14 États alors membres de la Zone Franc . AFRISTAT est l’unique organisation intergouvernementale ayant le développement de la statistique comme seul objectif de travail. En effet, il consacre l’essentiel de ses ressources au renforcement des capacités statistiques de ses États membres et de celles des institutions d’intégration économique sous-régionales. Le caractère purement statistique de cette organisation joue un rôle important pour les objectifs de développement des pays concernés et facilite la captation de la valeur produite par les données de la macro et micro-économie. L’importance de l’ouverture et de la disponibilité des données de qualité est cruciale pour l’administration fiscale dans la collecte et le contrôle des obligations fiscales des personnes physiques et morales. La donnée, prérequis à l’utilisation de l’intelligence artificielle, représente donc un enjeu de taille pour renforcer la confiance des contribuables en l’administration et transformer les formes, la nature et le paradigme du contrôle fiscal.

Les obstacles de l'open data

Les difficultés contextuelles auxquelles font face les acteurs présents sur le territoire ne facilitent pas la priorisation de la politique de transparence et d’ouverture des données d’autant plus que ces données sont captées majoritairement par les GAMAM (GAFAM) et les BATX dont les pratiques anticoncurrentielles sur le continent ne sont pas en la faveur de la croissance d’une économie numérique locale. Entre les coûts, encore très élevés, pratiqués par les opérateurs, les infrastructures inadaptées ou vieillissantes, la crise de l’électricité et le taux de pénétration de l’internet relativement faible, l’ouverture des données reste un défi à relever sur le plan technico-pratique et juridique.

Avantages et défis

L'open data a un potentiel immense pour améliorer la transparence et la reddition des comptes dans le secteur public camerounais. En rendant les données gouvernementales plus accessibles, les citoyens peuvent mieux comprendre comment les fonds publics sont utilisés et tenir les responsables gouvernementaux responsables de leurs actions.

L'open data peut également favoriser l'innovation et la croissance économique. En fournissant l'accès à des ensembles de données précieux, les entrepreneurs et les chercheurs peuvent développer de nouveaux produits, services et solutions qui répondent à divers défis sociétaux.

Cependant, plusieurs défis entravent l'adoption généralisée de l'open data au Cameroun. Il s'agit notamment d'une capacité technique limitée, de problèmes de qualité des données et d'un manque de sensibilisation des citoyens et des responsables gouvernementaux.

Pour aller de l'avant

Pour faire progresser davantage l'open data au Cameroun, il est nécessaire de s'attaquer aux défis existants et de développer des écosystèmes d'open data durables. Cela inclut l'investissement dans des programmes d'alphabétisation en matière de données, l'amélioration des normes de qualité des données et la création d'incitations pour que les institutions publiques partagent les données de manière responsable.

De plus, la promotion de la collaboration entre le gouvernement, les ONG, la société civile et le secteur privé est essentielle pour construire un écosystème d'open data solide qui puisse impulser un changement positif au Cameroun. Au fur et à mesure que les initiatives d'open data gagnent du terrain, le Cameroun peut récolter les fruits de la transparence, de l'innovation et de la gouvernance améliorée.

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